Bail d'habitation : comment régler les litiges entre un locataire et son propriétaire ?

De nombreux sujets de discorde peuvent survenir entre un locataire et son propriétaire en cours d’exécution du bail ou après l’état des lieux de sortie. L'objet de ce mémo n'est pas de répondre à toutes les questions mais de donner une indication sur certains sujets de conflit, qui lorsque l’on a la solution, sont facilement évitables.

Il s’agit simplement de l’application de la loi du 6 juillet 1989. Congé avec préavis réduit de 1 mois (art 15-1) Ainsi, lorsqu’un locataire veut faire valoir le délai de préavis réduit (pour mutation professionnelle, perte d'emploi, logement situé en zone tendue...) c'est au moment de l'envoi de la lettre de congé (privilégier le recommandé avec accusé de réception) qui doit être justifié la raison ouvrant droit au délai de préavis réduit, la solution donnée par la Cour de Cassation (troisième chambre Civile 11 avril 2019 n°18 - 14256) précise que le justificatif doit être fourni avec le congé. La révision du loyer (art 17-1) La révision annuelle du loyer n’est possible que si une clause du bail le prévoit (indice du coût de la construction ICC, indice des loyers commerciaux ILC).
La révision ne peut être rétroactive, la révision ne vaut que pour le futur. Ainsi, bailleur, si vous souhaitez faire valoir la révision du montant du loyer, signifiez le nouveau calcul avant la date anniversaire du bail. La restitution de la caution (art 22) Dans la plupart des cas une caution (dépôt de garantie) est prévue au bail, un mois maximum dans les logements vides.
Cette somme d’argent doit être rendue dans un délai maximum de 1 mois, à compter de la restitution des clés, si l’état des lieux de sortie est conforme à l’état des lieux d’entrée (importance de faire un état des lieux précis, à l’entrée et à la sortie et de le faire contradictoirement).

Si l’état des lieux fait état de différences, alors le délai pour la restitution est de deux mois.
Cette somme sert à garantir le paiement des sommes dues par le locataire (loyer, charges, réparation locative). Mais ces dettes doivent être justifiées.
Attention la sanction financière qui pèse sur la propriétaire que ne rend pas la caution dans le délai sans justificatif est de payer une somme de 10% du montant du loyer par mois de retard… faites le calcul. La question de la régularisation des charges (art 23) Chaque mois le locataire verse des provisions pour charges qui s’ajoutent au loyer (taxe sur les ordures ménagères, jardins et   électricité commun…). Le propriétaire doit procéder à la régularisation une fois par an.

A défaut de régulariser, le locataire peut intenter une action dans le délai de 5 ans à compter de la date de régularisation de charge et non de la date du paiement (Cass, 3ième Civ, 9 /11/2017, n° 16-22445). Ce délai n’est que de 3 ans en matière de baux soumis à la loi de 1er septembre 1948 (et HLM) (Cass, 3ième Civ, 8/03/2018, n° 17-11985)
  La question des travaux et de l'usure (art 7) C’est le sujet qui génère le plus de conflit. Le propriétaire se doit de livrer un bien en bon état et de faire à ses frais les travaux qui lui incombent. 
Les normes minimales d’habitabilité sont définies par un décret

Il incombe au locataire de maintenir le bien en bon état et de ne pas le détériorer :
https://www.cohesion-territoires.gouv.fr/entretien-courant-et-reparations-locatives-la-charge-du-locataire et https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=LEGITEXT000006066148

Et surtout, il est normal que le bien pris en location s’use, ce qui est expressément prévu par le décret du 30 mars 2016.Les contrats peuvent prévoir des grilles de vétusté telle que celle-ci : 
  Équipements Durée de vie Franchise Abattement/an Part résiduelle Parquet 20 ans 5 ans 5% 25% Moquette et aiguillette 7 ans 1 an 15% 10% Carrelage, faïence 20 ans 5 ans 5% 25% Faïence murale 20 ans 10 ans 8% 20% Papiers peints 7 ans 1 an 15% 10% Peinture 7 ans 1 an 15% 10% Dalles plastiques 15 ans 5 ans 8% 20% Dalles plastique (pièces humides) 10 ans 2 ans 10% 20% Plomberie, canalisations 15 ans 5 ans 8% 20% Chauffage 25 ans 5 ans 4% 20% Réseau électrique 20 ans 5 ans 5% 25% Appareils électrique/gaz de chauffage 15 ans 5 ans 8% 20% Quincaillerie 5 ans 2 ans 10% 20% Robinetterie 10 ans 2 ans 10% 20% Appareils sanitaires 20 ans 5 ans 5% 25% Appareils ménagers 8 ans 5 ans 2% 25%

 

 

Auteur : Nicolas Michelot
Cet article n'engage que son auteur.

Agent immobilier et commission en cas de refus de signature de la vente

Une clause pénale insérée dans le mandat de vente donné par un propriétaire à un agent immobilier ne peut permettre de contourner les dispositions impératives de la loi de 1970 en prévoyant par le jeu de cette clause le règlement d’une pénalité égale au montant qui aurait pu être perçu par l'agent immobilier en cas de réalisation de la vente, lorsque la non réalisation de la ventre est imputable au vendeur. Dans un article du 20 mars 2017, j’écrivais l'article suivant sur la commission de l'agent immobilier en cas de non réalisation de la vente.

La question de la rémunération de l'agent immobilier est source de très nombreux litiges entre agents immobiliers, vendeurs et/ou acquéreurs.

Si de nombreuses ventes se concluent par leur intermédiaire, notamment lorsque les biens deviennent rares ou compliqués à trouver, il est légitime que le travail réalisé fasse l'objet d'une rémunération.

Néanmoins, et parce que cette profession peut être extrêmement rémunératrice, la loi a strictement encadré les pratiques, pour réguler la profession d’agent immobilier et protéger sa clientèle.

Ainsi la loi numéro 70 - 9 du 2 janvier 1970, dite loi HOGUET, modifiée de nombreuses fois et notamment par le décret numéro 2010 - 1707 du 30 décembre 2010, en son article 6-1 alinéa 3 prévoit :

Aucun bien, effet, valeur, somme d'argent, représentatif d'honoraires, de frais de recherche, de démarche, de publicité ou d'entremise quelconque, n'est dû aux personnes indiquées à l'article 1er ou ne peut être exigé ou accepté par elles, avant qu'une des opérations visées audit article ait été effectivement conclue et constatée dans un seul acte écrit contenant l'engagement des parties. 

Dans le cas présent, une personne âgée de près de 85 ans avait régularisé un mandat de vente avec une agence immobilière, pensant que la vente de sa maison était alors une bonne solution.

Ce mandat contenait notamment une clause pénale qui mettait à la charge du vendeur le paiement d’une somme équivalente à la commission due à l’agence en cas de vente, si ce dernier ne signait pas la vente qui lui était proposée par le mandataire.
Un acheteur est finalement trouvé par l’agence et une proposition d’achat est acceptée par la vendeuse.
Le jour de signature du compromis chez le Notaire, la vendeuse refuse de signer.

L’agence immobilière la met alors en demeure de régler une somme de 14.000 € au titre de la clause pénale contenue dans le mandat de vente.
Devant l’absence de réponse, l’agence immobilière assigne la vendeuse par devant le TGI de BAYONNE afin de voir condamner la vendeuse au règlement de l’indemnité due au titre de la clause pénale, et ce sur la base de la force obligatoire des contrats.

Par jugement du 6 mars 2017 le Tribunal de Grande Instance de BAYONNE rappelle qu'une clause pénale insérée dans le mandat de vente donné par un propriétaire à un agent immobilier ne peut permettre de contourner les dispositions impératives de la loi de 1970 en prévoyant par le jeu de cette clause le règlement d’une pénalité égale au montant qui aurait pu être perçu par l'agent immobilier en cas de réalisation de la vente, lorsque la non réalisation de la ventre est imputable au vendeur (sans qu’une faute civile ne soit retenue).

La commission d’agence n’est pas du si le vendeur refuse de réitérer la vente.

Ce n’est que reprendre une jurisprudence constante de la Cour de Cassation (3ième Civ, 9 juillet 2014, 13-19601) : 

Mais attendu qu'il résulte des dispositions d'ordre public de l'article 6-1 de la loi du 2 janvier 1970 qu'aucune commission ni somme d'argent quelconque ne peut être exigée par l'agent immobilier ayant concouru à une opération qui n'a pas été effectivement conclue ; que la société I. ne peut, dès lors, prétendre, sous couvert de l'application d'une clause pénale, au paiement d'une indemnité compensatrice de sa perte de rémunération ; .

La 1ière chambre civile de la Cour de cassation est venue récemment confirmer cette jurisprudence, Civ 1ière , 3 mai 2018 ° 17-16657 :

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que la vente n'avait pas été effectivement conclue, de sorte que l'agent immobilier ne pouvait se prévaloir des dispositions de la clause litigieuse, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Voir pour un commentaire de l’arrêt l'article suivant sur la rémunération de l'agent immobilier en l'absence de signature du compromis de vente

En revanche, la situation aurait été différente si le refus du vendeur était intervenu entre la signature du compromis et la réitération (signature définitive chez le notaire). 

En effet, la signature du compromis notarié (en l’espèce une promesse synallagmatique de vente) emporte un accord sur la chose et le prix. En théorie, la vente est dite « parfaite ». La réitération n’étant que la formalisation de du contrat de vente.  

Aussi, l’acquéreur qui refuse de signer la vente (sauf si des conditions suspensives ne sont pas réalisées) commet une faute de nature à engager sa responsabilité envers l’agent immobilier et peut être condamné à verser une indemnisation à l’agent immobilier :
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait retenu que la signature de la promesse synallagmatique de vente constituait un accord définitif sur la chose et sur le prix, et que M. et Mme X... ne pouvaient, sans commettre une faute, refuser de la réitérer, faisant ainsi ressortir que l'opération avait été effectivement conclue, de sorte que ce refus ne pouvait avoir pour effet de priver l'intermédiaire de son droit à rémunération ou à indemnisation, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Civ 1ière, 10 octobre 2018 n° 16-21044 


L’achat ou la vente d’un terrain ou d’une maison sont des opérations sérieuses et à forts enjeux financiers dans lesquelles il ne faut pas s’engager avec légèreté.
Il peut être prudent de se faire conseiller ou assister par un avocat.

 

Auteur : Nicolas Michelot
Cet article n'engage que son auteur.

Qu'en est-il de la rémunération de l’agent immobilier évincé de la vente alors qu’il avait présenté le bien aux acquéreurs ?

Acheteurs : le simple fait de rechercher une économie en contractant directement avec les vendeurs dans le but de payer un prix moindre ne peut engager leur responsabilité.
Les faits de l’espèce sont simples, une agence immobilière reçoit un mandat non exclusif de vente pour un bien, les « frais d’agence » sont à la charge du couple vendeur.

Quel impact de la réforme du droit des obligations sur la rémunération de l'agent immobilier ayant reçu mandat de gestion ?

C'est de nouveau au sujet d'un contentieux opposant des propriétaires immobiliers à leurs agents immobiliers, sur l'application jurisprudentielle de la loi du 2 janvier 1970 dite Loi « HOGUET », que la Cour de Cassation fait évoluer une jurisprudence constante et bien ancrée par la mise en œuvre de la réforme du droit des obligations issues de l'ordonnance du 10 février 2016.
Le premier arrêt, rendu par la Chambre mixte le 24 février 2017, concernait la validité d'un mandat donné à une agence immobilière pour faire délivrer un congé avec offre de vente.