Droit au préavis réduit pour le locataire dont le CDD prend fin
En principe fixé à trois mois lorsqu’il est à son initiative, le délai de préavis du locataire est ramené à un mois pour faire face à des situations particulières, limitativement énumérées. La jurisprudence est venue apporter des précisions sur ces cas.Dans quelle(s) situation(s) le locataire peut-il donner prématurément congé au bailleur ?L’article 15 de la loi n°89-462 du 06 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs prévoit que le délai de préavis est de trois mois lorsque la résiliation du contrat de bail d’habitation (1) émane du locataire (2). Il s’agit pour le bailleur d’un logement (non meublé (3)) de disposer d’un délai suffisant pour trouver un nouveau locataire.
Sans qu’il soit question de multiplier les dérogations à ce délai de principe, l’article 15. I. alinéa 2 prévoit que le délai de préavis est ramené à un mois :
- en cas d’obtention d’un premier emploi, de mutation, de perte d’emploi ou de nouvel emploi consécutif à une perte d’emploi ;
- concernant les locataires âgés de plus de soixante ans dont l’état de santé justifie un changement de
domicile et les bénéficiaires du désormais revenu de solidarité active (4) qui se substitue au revenu minimum d’insertion.
Si certains des cas de figure ainsi limitativement énumérés sont peu sujets à interprétation (5), la jurisprudence est venue apporter des précisions, notamment, sur ce qu’il convient d’entendre par « mutation » ou « perte d’emploi ».
Ainsi, concernant les mutations professionnelles, la Cour de cassation a-t-elle considéré que le préavis réduit était applicable tant à la mutation imposée par l’employeur qu’à celle consécutive à une demande de changement de poste du salarié (Cass. Civ. 20 janvier 2010) - aucune condition d’éloignement n’étant à cet égard imposée.
S’agissant de la notion de perte d’emploi, il s’agit de la perte involontaire de son emploi. D’où le maintien du délai de principe de trois mois concernant les changements d'activité professionnelle volontaires, les départs à la retraite et les démissions. D’où, également, l’irrecevabilité de l’argument tenant à la seule crainte du locataire de voir son poste supprimé (Civ. 3. 21 juillet 1999).
A contrario, le délai de préavis réduit est non seulement applicable en cas de licenciement mais encore lorsque le contrat de travail à durée déterminée arrive à son terme, ainsi que l’a récemment précisé la Cour de cassation dans un arrêt rendu en date du 8 juillet 2009 (Cass. Civ. 3e, 8 juillet 2009).
Saluons cette décision rassurante pour les titulaires de contrats de travail « précaires » et qui rejoint la position des juges du fond ayant accordé le droit au préavis réduit dans l’hypothèse où le contrat de travail à durée déterminée ou la mission d’intérim prend fin (CA Paris, 17 juin 1999 ; CA Nancy 19 septembre 2002, CA Lyon 13 janvier 2009).
Il convient cependant de préciser que le bénéfice du préavis réduit, comme toute prérogative contractuelle, reste soumis à l’exigence de loyauté. En effet, les baux, à l’instar de toutes les conventions, doivent être exécutés de bonne foi au sens de l’article 1134, alinéa 3 du Code civil. Et c’est d’ailleurs sur ce fondement que la Cour de cassation avait privé un locataire de la possibilité de donner prématurément congé au bailleur ; ce dernier l’ayant invoqué alors que son CDD expirait trois semaines seulement après la conclusion du bail… (Cass. Civ. 3. 30 septembre 1998).
Index:
(1) Le congé doit être notifié par lettre recommandée avec accusé de réception ou signifié par acte d’huissier, le délai courant à compter du jour de la réception de la lettre recommandée ou de la signification de l’acte d’huissier.
(2) Le délai de préavis est de six mois lorsqu’il émane du bailleur.
(3) Le locataire d’un bien meublé peut résilier le bail à tout moment sous réserve de respecter un préavis d'un mois, quel que soit le motif de la résiliation.
(4) La possibilité de donner congé au bailleur dans un délai de un mois a été étendue par l’article 5 de la loi de simplification et d’amélioration de la qualité du droit aux bénéficiaires du RSA issu de la loi n°2008-1249 du 1 er décembre 2008 entrée en vigueur le 1er juin 2009. Cette possibilité demeure en revanche fermée aux bénéficiaires de l’ASS (allocation spécifique de solidarité).
(5) Cas de la restrictive condition cumulative du locataire de plus de 60 ans dont l’état de santé justifie un changement de domicile.
Auteur : Aurélia Duclerc
Cet article n'engage que son auteur.