La renonciation du bailleur à sa déclaration de loyers vaut renonciation à poursuivre la résiliation du bail pour non-paiement de ces loyers
A la lecture de cet arrêt, non publié, de la Cour de Cassation du 5 octobre 2022 (pourvoi n° 21-11.759), il paraît évident qu’un bailleur qui a déclaré entre les mains du mandataire judiciaire sa créance de loyer puis y a renoncé, a nécessairement renoncé à demander la résiliation du bail pour non-paiement desdits loyers.
Pourtant, les héritiers de ce bailleur qui poursuivaient la résiliation du bail, avaient obtenu gain de cause auprès de la Cour d’appel de renvoi (après une première cassation), celle-ci ayant considéré que le bailleur n’avait pas renoncé à la requête qu’il avait déposée auprès du Juge-commissaire aux fins de constatation de la résiliation du bail de plein droit.
Dans cette espèce, après avoir déclaré sa créance et demandé l’acquisition de la clause résolutoire, le bailleur avait participé à l’acte de cession orchestré par le liquidateur judiciaire pour renoncer aux loyers déclarés, aux commandements de payer visant la clause résolutoire ainsi qu’à engager la responsabilité du liquidateur au titre des loyers solidaires non payés.
L’acte de cession ne visait pas expressément la renonciation à la requête en résiliation de bail.
Au visa de l’article 1103 du code civil selon lequel « la renonciation à un droit peut être tacite et résulter d'un comportement du créancier qui est, sans équivoque, incompatible avec le maintien de ce droit », la Cour de Cassation casse l’arrêt d’appel et, sans renvoyer, déclare les héritiers du bailleur irrecevables à demander la constatation de la résiliation de plein droit du bail.
Une fois n’est pas coutume, le bon sens vient réparer une erreur de plume via l’interprétation d’une attitude non équivoque.
Auteur : Julie Jacquot
(Cassation ch. commerciale, arrêt du 21 septembre 2022, pourvoi n° 20-21416, publié au bulletin)
Pour solliciter en référé la désignation d’un mandataire ad hoc, il suffit de prouver soit le trouble manifestement illicite, soit le dommage imminent (art. 873 CPC).
Il n’y a pas lieu à démontrer une entrave au bon fonctionnement de la société et la menace d’un péril imminent. En effet, ces deux dernières conditions sont celles exigées pour la désignation d’un administrateur provisoire.
La Cour de Cassation veille ainsi à la distinction entre ces deux fonctions :
- le mandataire ad hoc a des missions spécifiques/ponctuelles, ce qui justifie une souplesse dans sa désignation ;
- l’administrateur ad hoc a vocation quant à lui à diriger pleinement la société, ce qui justifie la preuve de circonstances rendant impossible le fonctionnement normal de la société et menaçant celle-ci d’un péril imminent.
Dans cette espèce, le gérant associé minoritaire d’une société U-Web sollicitait la désignation d’un mandataire ad hoc non seulement pour représenter l’associé majoritaire avec lequel il était en conflit dans le cadre des décisions à voter en assemblée générale, mais également pour représenter la société U-Web.
Anticipant son évincement dans la gestion de la société, l’objectif de ce gérant était vraisemblablement de permettre à la société U-Web de poursuivre le procès qui l’opposait à des filiales de son associé majoritaire et anticiper notamment la possibilité d’interjeter appel d’une décision défavorable.
Si la Cour de Cassation lui donne une seconde chance devant la Cour d’appel de renvoi, on peut s’interroger sur l’opportunité de poursuivre une telle instance : le délai du pourvoi aura très certainement dépassé le délai de recours de ce second procès.
Enfin, la Cour de Cassation profite de cet arrêt pour rappeler qu’une ordonnance de référé ne peut être modifiée ou rapportée qu’à charge de démontrer l’existence de circonstances nouvelles (art. 488 CPC). En effet, le demandeur avait échoué une première fois dans sa demande : il lui faut par conséquent prouver l’existence de circonstances nouvelles survenues depuis la première ordonnance de référé pour solliciter une nouvelle fois la désignation d’un mandataire ad hoc.
Auteur : Julie Jacquot